lundi 7 juillet 2014

La dame aux camélias - Alexandre Dumas fils

 (Attention : je révèle la fin et des éléments de l'histoire)


                                                Sarah Bernhardt dans le rôle de la Dame aux camélias

Le récit s'ouvre sur la mort d'une femme inconnue et se ferme sur la mort d'une femme amoureuse. Cette femme ? Une cocotte, comme on disait alors sur un ton dédaigneux. Une femme de mauvaise vie, à qui personne ne veut parler mais que tout le monde observe à l'opéra, comme si ce qu'on venait voir ne se déroulait pas sur scène mais se passait dans la loge de l'infâme personne. Qui viendra la voir ? Quel homme achète ses tendresses ? Telles sont les questions que l'on pose, du bout des lèvres pour ne pas paraître trop intéressé par ces commérages. Cette femme, c'est Marguerite Gautier, une belle jeune femme que les hommes rêvent de posséder. Mais au début du récit, ce sont ses meubles qui sont à vendre. La jeune femme est décédée, laissant derrière elle des dettes à n'en plus finir. Le narrateur découvre les objets qui lui ont appartenu, des objets qui ont une histoire, qui en savent bien plus que n'importe qui dans l'entourage de Marguerite. Plus tard, lors de la vente aux enchères, le narrateur achète le roman Manon Lescaut. Cet achat le plongera dans une histoire, non pas celle de Manon, mais celle de Marguerite que lui racontera Armand Duval, son ancien amant. Ancien amant qu'elle a profondément aimé, et cet amour profond qui semble étrange de la part d'une courtisane, le lecteur peut le découvrir au fil du récit d'Armand. J'ai douté. J'ai douté de l'amour de Marguerite, je me suis demandé si elle aimait vraiment Armand, si elle ne se jouait pas de lui. Mais au fil des pages, au fil des événements racontés par Armand, j'ai cessé de douter. Marguerite m'est apparue peu à peu comme une jeune femme fragile, elle qui pourtant voulait apparaître si forte pour ne pas crouler sous les commérages et les regards suspicieux. Elle m'est apparue comme une femme qui voulait seulement être aimée. Elle avait tout ce qu'elle souhaitait : les bijoux, les somptueuses toilettes, le regard envieux des épouses trompées...Mais elle n'était pas désirée pour ce qu'elle était. Les hommes la voulaient comme un objet qu'on exhibe pour prouver qu'on est riche. Seul Armand l'a voulue comme elle était, il a aimé Marguerite et non pas la courtisane. Marguerite, la moqueuse qui l'a humilié la première fois qu'ils se sont vus, Marguerite la charmeuse qui l'a invité chez lui avec d'autres amis, intriguée qu'elle était par le dévouement du jeune homme, Marguerite la malade qui se cache pour colorer de sang des mouchoirs immaculés.

 Affiche d'Alfons Mucha (1860-1939)

Pourquoi ai-je douté de l'amour de Marguerite ? J'ai douté comme Armand, Armand qui veut que Marguerite ne soit que pour lui mais Marguerite ne peut lui appartenir. Elle ne s'appartient pas elle-même. Marguerite, elle appartient à ceux qui paient. Armand ne peut pas la payer, il n'est pas assez riche pour cela et même lorsqu'il va donner tout ce qu'il a, ce ne sera pas assez.

Marguerite et Armand, Armand et Marguerite, c'est une histoire d'amour impossible. Ils ont essayé de vivre leur amour au grand jour, puis de se cacher loin de Paris, mais c'était impossible. Marguerite était prête à tout quitter pour Armand, elle était prête à abandonner sa vie luxueuse pour vivre loin de tout. Juste pour lui. Comment ne pas en être touché ? Et quand Armand, affaibli, du fond de son lit, donne la dernière lettre qu'il a reçu de Marguerite au narrateur, on a comme l'impression de voir sur le papier des larmes ayant coulé sur l'encre. Cette lettre, c'est la dernière déclaration d'amour d'une courtisane qui, sur le point de mourir, se rappelle comme il avait été bon d'être aimée de son Armand. Cette lettre, c'est le cri de désespoir d'une courtisane qui, loin de se complaire dans la vie qu'elle mène, se sent prise au piège dans un engrenage sans fin. C'est le dernier soupir d'une amoureuse qui sent la mort approcher.

En lisant le dernier mot, en voyant le point final, on a envie d'aller chez le fleuriste, de prendre un bouquet de camélias, et de le poser sur la tombe de la morte amoureuse.

1 commentaire:

  1. Je l'ai acheté il y a peu de temps mais je ne pense pas le lire tout de suite. Je ne prend pas de risque quand même, je ne lis pas ta critique car j'aimerai avoir la surprise au fil de ma lecture...

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